Souvent le numéro un de toutes les listes des signaux à apprendre au chien, sujet de beaucoup d’articles, source de bien des tensions entre le chien et son humain, le rappel est à la fois la base de l’éducation et la base des ennuis.
Pour moi, avoir un chien qui revient au rappel est un indispensable. Non seulement parce que c’est une assurance vie ( on n’est jamais à l’abri d’une porte mal fermée ou d’un chien qui descend un peu vite de la voiture), mais aussi parce que le déplacement en liberté est pour moi une condition sine qua none au bien être du chien. Mais comme un grand nombre de gens, je me suis déjà retrouvée face à des chiens ignorant superbement le rappel, que ce soit les miens ou ceux des autres. Des chiens connaissant parfaitement le signal, chez qui le retour a été renforcé de façon adéquate et qui sont sortis régulièrement.
Alors, pourquoi ça ne marche pas? Comme toujours, il n’y a pas de vérité absolue, pas de formule magique. Mais cet article a vocation a donner des pistes de réflexion qui, je l’espère, vous aideront à comprendre pourquoi parfois, souvent, toujours, votre chien ne revient pas lorsque vous l’appelez.
La première chose à se demander, en particulier pour le rappel, mais c’est valable pour tous les signaux, c’est : Est ce que mon chien est en capacité de réaliser ma demande?
Systématiquement, pour réaliser notre demande, notre chien doit renoncer à ce qu’il est entrain de faire ou à ce qu’il a l’intention de faire. Et ce renoncement est d’autant moins accessible au chien que l’action en cours ou à venir a de la valeur. Cette valeur est à la fois intrinsèque à l’action ( creuser un trou, c’est fun épicétou) et circonstanciel (courir partout après 3jours de repos post ostéopathe, ça fait vraiment trop du bien). Quand la valeur de l’action est trop forte, le rappel passe après.
Pour conserver une valeur élevée au rappel il faut que ses conséquences soient hautement positives et limiter le nombre d’échec. Plus on le demande, plus il est difficile de conserver cette valeur. Il est donc intéressant de se poser la question suivante: est ce vraiment un rappel que je souhaite?
Par rappel, j’entends ici le retour du chien à l’humain. Dans certains cas, cela est nécessaire. Quand il est l’heure de rentrer ou quand un groupe de chevaux arrive à l’horizon par exemple. Mais l’utilise t on vraiment seulement quand il est nécessaire? Parfois, ce dont nous avons besoin ce n’est pas que le chien revienne à nous, mais plutôt qu’il ignore un stimulus ou qu’il reste dans le secteur, ou bien encore qu’il se rapproche. Bref des demandes bien moins contraignantes, et donc beaucoup moins frustrantes, et donc beaucoup plus accessibles au chien.
En demander moins, pour en avoir plus.
Troisième élément et non des moindres, l’ambiance émotionnelle de la balade.
Le premier pendant est assez connu: votre chien ne vient pas à votre rappel, vous retentez, il ne vient toujours pas, vous commencez à vous agacer et là c’est foutu. Bon, ce n’est pas le cas de tous les chiens, mais pour une bonne partie, vous sentant stressé, énervé voir franchement en colère, le chien va fuir votre contact. Pour le rappel, on repassera.
Le deuxième aspect, et on en parle moins, c’est l’état émotionnel du chien. Un chien hyper excité aura bien plus de mal à se contenir pour revenir à vous, et encore plus à ralentir voir s’arrêter pour que vous le récupériez.
Enfin, un point que je ne vais pas beaucoup développer ici parce qu’il y a énormément à dire et que je pense que ce sera le sujet d’un futur article, le relationnel que vous avez avec votre chien. Au delà de la valeur que le signal de rappel a pour lui, construite lors de l’apprentissage, le plaisir qu’a votre chien à être avec vous est un facteur important de réussite – ou d’échec.
Ceci est bien joli, mais concrètement quoi qu’on fait?
Votre rappel a de la valeur, vous avez travaillé pour. Mais pour que cela soit suffisant, il faut que les comportements concurrents n’aient pas une valeur tellement élevée que le rappel à côté, c’est peanuts, et que lui comme vous soyez en situation de réussite.
En d’autres termes, un chien et une relation équilibrés sont le nerf de la guerre du rappel.
Voici donc les pistes promises:
Observez.
Juste observez. Prenez votre chien en balade, libérez le et observez ce qu’il fait. Essayez de vous taire, d’intervenir le moins possible (bon du coup, ne vous baladez pas à côté d’une voie rapide ou dans un parc bondé). Observez ce qu’il fait durant cette balade, ce qu’il choisit de faire lorsque vous n’intervenez pas. Vous pourrez alors avoir une idée de ce qu’il aime et ce dont il a besoin. A t il la possibilité d’avoir ces comportements lors de vos sorties habituelles?
Soyez honnête.
A la lumière de ce que vous savez de votre chien, de vos habitudes et de ce que vous avez observé lors de cette sortie, demandez vous: Mon chien est il réellement épanoui dans le quotidien que je lui propose?
Bouge t il assez? Renifle t il suffisamment? A t il suffisamment d’activité mentale? Physique? Est il satisfait de ses contacts congénères? Est il comblé dans ses besoins de pister, de creuser, de se rouler, de découvrir, d’observer, de cacher, de décider? Hé oui, les balades permettent tout cela et d’autres choses encore.
Si vous avez un doute sur un de ces critères, faites un test. Donnez la possibilité à votre chien de s’exprimer plus dans ce domaine et voyez ce que cela donne.
Certains nécessiteraient de sortir plus, comme un besoin d’exploration insuffisamment satisfait. D’autres pourront trouver une réponse dans une autre activité, comme des jeux d’intelligences pour un chien qui manque de sollicitation mentale.
Mais pour d’autres encore, c’est plus complexe. Comment faire lorsque ce qui manque à notre chien,ce qui fait qu’il a du mal à revenir, c’est qu’il a besoin d’explorer librement, quitte à s’éloigner parfois? (mode vécu on)
Gérer l’environnement.
C’est loin d’être la première fois que j’en parle, et je suis intimement convaincue qu’il s’agit d’un levier important pour bien des problématiques.
Choisissez des lieux, des moments, qui permettent à votre chien de profiter de la balade dont il a besoin, dans le respect d’autrui et en toute sécurité. Pas forcément à chaque sortie, parce que ce n’est pas toujours humainement ou logistiquement possible, mais même de façon ponctuelle, ces bulles d’air donneront à votre chien la possibilité d’accepter des contraintes plus importantes lors d’autres sorties.
Utilisez la commande juste.
Dans cette même logique, donnez à votre chien de l’air en ne lui imposant que le niveau de contrainte nécessaire. Lorsqu’on demande un « Tu laisses », tout ce qui est demandé au chien c’est de ne pas s’occuper d’un stimulus en particulier (un joggeur par exemple). Mais en dehors de ça, il fait ce qu’il veut. Il peut creuser, il peut renifler, il peut marcher ou courir. Un « on y va » chez moi signifie que je me déplace et qu’il faut qu’il me suive. Mais à 1 ou 20 mètres, je m’en fiche un peu.
On peut continuer dans cette voie encore longtemps. L’idée est de faire en sorte que le chien puisse le plus possible profiter librement de sa sortie, sans gêner les autres.
Soyez zen.
Tous les deux.
Travaillez vos signaux ou l’attitude de votre chien face à certains stimuli, et une fois parvenu à ce que vous souhaitez, faites confiance à votre apprentissage.
Apprenez à le connaître et à connaître ses comportements dans les différents lieux que vous fréquentez et ne vous mettez pas en échec (N’allez pas le lâcher là vous savez qu’il part en chasse et qu’il met du temps à revenir alors que vous êtes déjà en retard – expérience familiale désagréable à l’appui).
Apprenez lui à gérer l’intensité de ses émotions afin qu’il soit plus réceptif à vos demandes (en gardant à l’esprit que plus l’événement est rare, plus l’émotion est intense, les 4 premiers points vous aideront sans doute déjà là dessus).
Et enfin, soyez plus proches… Mais on en reparlera ;).
En conclusion, parce que je tiens à ce que ça ne soit pas mal interprété, le message ici n’est pas: Laissez le faire n’importe quoi, il reviendra. Non, il n’est absolument pas question de mettre le chien en danger ou de manquer de respect aux autres usagers.
Le but est de vous aider à prendre conscience de ce que la balade représente pour votre chien, pourquoi en conséquence le rappel peut être si conflictuel parfois, et vous donnez des pistes vers un rapport plus serein.
Finalement, cet article sur le rappel s’inscrit dans la veine de celui sur les sorties et de celui sur le contrôle: Comprendre son chien, le respecter et le guider.